Tropical Jazz Trio

On peut parler d'autre chose
Sortie le 31 mars 2023
Label: French Paradox
Avec ce nouvel album, Patrice Caratini, Alain Jean-Marie et Roger Raspail perpétuent une conversation musicale entamée autour de la rencontre séculaire de l’Afrique et de l’Europe aux Amériques.
Avec ce nouvel album, Patrice Caratini, Alain Jean-Marie et Roger Raspail perpétuent une conversation musicale entamée autour de la rencontre séculaire de l’Afrique et de l’Europe aux Amériques.

Des îles de la Caraïbe aux continents du Nouveau Monde, les trois musiciens mêlent peaux et métaux des langages afro-américains aux instantanés du jazz. La singular- ité de l’instrumentation et la multiplicité des interactions du trio ouvre alors tous les possibles. La simplicité trompeuse du propos recèle des raffinements sonores dont le public est invité à se saisir tout au long d’un répertoire évoquant les cubains Chucho Valdés et Mario Bauza, le brésilien De La Freire, les incursions latines de Dizzy Gilles- pie où l’élégance d’un thème de Kenny Wheeler, et donnant à découvrir les composi- tions des trois protagonistes comme le 22 Mezouk d’Alain Jean-Marie sur un dessin de mazurka, le Miss Jo de Patrice Caratini convoquant les mânes de Joséphine Baker ou le Sé pou vélo de Roger Raspail dédié au percussioniste guadeloupéen Marcel Lollia.

Entre mambo, swing et accents du Gwo Ka, le Tropical Jazz Trio donne à entendre une musique exigeante mais lisible, défendue par des artistes de haut vol dont le parcours s’inscrit depuis maintenant un demi-siècle dans le patrimoine musical.

Et pour ce nouvel opus, les trois musiciens ont souhaité apporter une nouvelle couleur à leur palette et y associer la jeune génération en invitant l’accordéon de Maryll Abbas à se joindre à eux sur deux titres.
Longtemps nous avons fait de la musique ensemble.

J’ai rencontré Alain Jean-Marie dans les années soixante-dix sur la rive gauche de la Seine, dans la section rythmique du saxophoniste Michel Roques aux Trois Mailletz, rue Galande, et, quelques années plus tard, sur l’autre rive, j’ai rejoint Roger Raspail au Dreher place du Châtelet, pour y accompagner Mal Waldron associé au trompettiste Roy Burrows. Á cette époque les occasions de jouer ne manquaient pas pour les musiciens du rythme. Un tempo viable, une oreille à l’affût et les propositions affluaient. Les clubs programmaient les orchestres plusieurs semaines de suite et, de gigs parisiens en con- certs de province, nous côtoyions la grande histoire du jazz dans les caves du Petit Opportun, une semaine en compagnie de Charlie Rouse à jouer la musique de Monk, une autre avec le Little Giant Johnny Griffin, ou au Chat qui pêche avec le tromboniste Slide Hampton. Á un autre moment, nous partions retrouver Lee Konitz en Lorraine sur la scène d’un festival éphémère. Au gré des circonstances, nous nous efforcions de faire coïncider nos désirs de musique avec l’économie du quotidien. Ainsi allait la vie du jazz de ces années qui furent nos universités nourricières.

Durant les quatre décennies qui suivirent, nos pérégrinations musicales nous emmenèrent sur bien des chemins qui souvent se croisaient pour mieux bifurquer vers d’autres horizons, nous retrouvant le temps d’une Nuit du jazz fugace ou d’une session d’enregistrement underground. D’autres moments voyaient naître d’improbables aven- tures comme les concerts réunissant Biguine Reflections et le Caratini Jazz Ensemble sur le même plateau. Depuis quelques années, nous avions pris le pli de nous produire en petite formation ici ou là, piano, contrebasse et percussions suivant l’empreinte afr- icaine des musiques que nous aimons.

Nous passions d’une scène à l’autre avec l’insouciance légère de nos débuts, pour le plaisir simple de la musique, jusqu’à ce que la rencontre avec le jeune label French Par- adox nous amène dans un studio pour enregistrer un album. Confrontés pendant trois jours à notre propre travail, nous nous sommes alors efforcés d’en trouver le sens, tra- vaillant sur la matière musicale, expérimentant de nouvelles idées et nous attachant à résoudre les questions liées à une instrumentation inusuelle.

Dans le doute et l’interrogation tout au long des prises, nous fûmes surpris à l’écoute du master final. Sans y prendre garde, au cours de ces années, nous avions construit une histoire musicale dont l’enregistrement nous renvoyait l’écho.

Le Tropical Jazz Trio était né.